La délivrance de Cnossos

L’être primordial (mère-hibou), qui ne rencontrait aucun obstacle (il tournait simplement autour de son axe), était contraint d’en concevoir un et de mettre à l’ épreuve sa capacité d’exister, en la projetant sur le néant. C’est ainsi que fut formé le Labyrinthe d’un Regard rendu indépendant de la lumière: celui qui est une manifestation de l’audace de l’être primordial de subir le spectacle de sa propre inexistance: quadrangulaire de sa propre excommunication du monde qui venait d’être créé. Or, celui-ci, en tant qu’espace de possibilité de coexistence des différences, continue à se reproduire en se multipliant par lui-même, en se réduisant et en intégrant un quart en lui-même par sa propre projection dans l’avenir: comme encadrement de l’opposition fixée au départ.

FRANCOIS DE NOME

          C’est ainsi que se forme une catégorie secondaire de vision de l’être primordial qui détermine le segment de sa puissance quadrangulaire: une paire d’oppositions (multipliables, supersymétriques): Jüno et Génie, deux pôles (d’entrée et de sortie) du fuseau céleste qui, en tournant continuellement autour de son pivot, polit le diamant du néant; ennoblit la nature de la lumière (dompte le regard insupportable du monstre); dévie cette lumière dans l’espace d’au-délà du miroir où elle devient la fugue de son engourdissement terrestre, corde vibrante de la lyre, d’où son pouvoir de créer des images, sa vie étant puisée dans la mosaïque complexe du son de son propre écho sonore qui s’amplifie après sa mort.

          Cependant, pour permettre à ce  fuseau céleste de fonctionner comme il faut – ni Minotaure, propriétaire terrestre de Jüno, ni Ariane, propriétaire terrestre du Génie n’ont pas le droit de garder la présence de ceux-ci: ils doivent les lâcher dans l’éther où ils s’entrecroiseront – tout comme dans un hexagramme, symbole insigne d’une union spontanée.

          Ariane (mère-hibou, créée par elle-même, qui était descendue provisoirement sur la Terre), a congédié son Génie; Minotaure, par contre, (père, créé par lui-même, de l’unicorne, et compositeur de la musique d’isolement) n’a pas congédié sa Jüno – sosie éthérique d’Ariane, qu’il croyait, par erreur, être Ariane elle-même, profondément dégoûtée de vivre dans le monde souterrain.

FRANCOIS DE NOME

          Or, c’est elle qui dut – conduite par le Génie du fil commençantle tissage céleste – s’acheminer vers l’abîme du Labyrinthe c’est-à-dire vers la voie sans issue réorientantant un regard de dragon qui-voit-tout – pareil à celui qui fut projeté dans les entrailles du Globe terrestre, dès avant la création de la vie sur la surface de la Terre. Et alors – après avoir rejoint Minotaure, reprendre Jüno (ivre de nostalgie, âme non sélectionnée au niveau du monde), en confirmant ainsi la vie indépendante de son image primordiale capturée (interprétée d’une façon erronée). Ce n’est qu’ensuite que le fil de la texture du destin, tiré d’un grain vénéneux du monde souterrain, fut exempté de la nécessité de faire des répétitions dans le tissage et recroquevillé afin d’éviter d’être coupé par la pointe du fuseau qui s’allongeait. Et parallèlement à cela, la corne de Minotaure fut recroquevillé, à son tour, en formant le croissant de Lune, tout comme à la fois, la coupe des larmes de Vénus.

           C’est ainsi que, du haut de la plate-forme orageuse de l’omniscience (trône du monde souterrain coïncidant à la plus grande hauteur), descendit un rayon de lumière oblique qui, d’une manière nouvelle, indicible, éclaire le système légalement établi d’ici-bas: la ville de Cnossos qui a métamorphosé définitivement et présenté sur la surface du globe son principe fondamental le plus profond.

GRIMSHAW

 


Voie de transfiguration de la matière

– L’île de Délos bordé d’or –

YAROSLAV_GERZHEDOVICH

              L’œil du Soleil a épanché les ténèbres de sa propre prunelle dans le cercle insulaire le plus étroit, celui de Crète. C’est ainsi que s’est formé un puits de souvenirs où se reflétaient toutes les futures horreurs de l’humanité, si bien que celle-ci, courroucée, crachant du feu et des flammes, s’éteignit sous sa propre cendre. Cependant, dans cette cendre volcanique était tracée l’empreinte de la vision solaire /projet d’une cité cosmopolite fortement stylisée/, – celle qui concernait le temps posthumain (apollonien), consacré au cygne. Or, le courant-d’air souterrain emporta toute cette poudre cendreuse jusqu’à une caverne creusée dans une hauteur terrestre (celle de Delphes) qui exhalait la vapeur provenant des gouttes de l’Étoile du Nord, impossible à atteindre. Et c’est là, au point de rencontre creux des montagnes que se produisit la collision de deux flux; la friction de deux prunelles: celles de la Lune et de Gorgone, dont le regard est voilé et celles du Soleil et de Perséphone qui sont clairvoyantes. Du vide de leur tourbillonnement naquit le trosième œil: bannière de références personnelles de la Mère, attirée vers son vide central – passage vers l’au-délà, vers le pays des Hyperboréens. Mais en arrière aussi: vers l’endroit d’instauration archiancienne de l’immuable critère de la distinction, c’est-à-dire celui de la naissance de la première paire d’yeux rebelles (ceux d’Arthémis et d’Apollon); vers l’île Délos qui, enveloppée de l’aile à sept couleurs de la lumière de minuit, fut bordée de paillettes d’or. Désormais, elle n’était plus habitable par les humains.

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Catherine Ristitch Aglaé

Katarina Ristić Aglaja

Traduction: Zoritza Hadji-Vidoikovitch

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